Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/251

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tions formulées en des termes aussi vagues. Les jésuites avaient appelé Pascal Porte d’Enfer. « Comment, disait gaiement l’auteur des Provinciales, démontrer que je ne suis pas une porte d’Enfer ? » Heureusement, je n’éprouverai pas, moi, dans cette circonstance, l’embarras de Pascal ; deux faits, deux faits incontestables, réduiront au néant le reproche d’ambition adressé à l’ancien secrétaire de l’Académie des sciences.

On propose à Condorcet d’être le précepteur du dauphin ; il refuse.

On lui offre le ministère de la marine ; il refuse encore, et fait nommer Monge.

Prenez maintenant l’histoire de tous les temps et de tous les pays, et si vous y rencontrez un seul ambitieux qui n’ait point accepté avec empressement deux positions aussi élevées que la position de ministre et celle de gouverneur de l’héritier présomptif d’une couronne, je passe condamnation sur l’accusation blessante dont Condorcet a été l’objet de la part de M. de Lamartine.

Cette accusation porterait-elle sur l’amour de l’argent, la plus âpre, la plus vive, et je puis ajouter la plus vile des ambitions ? Toute réfutation à cet égard serait superflue, après tant de traits de désintéressement que j’ai cités dans ma Biographie. Voudrait-on, enfin, car je dois tout prévoir, parler de l’ambition si commune, et cependant si puérile, qui consiste à accaparer des centaines de titres scientifiques et littéraires ? Je ferai remarquer que personne ne les envisageait avec plus de philosophie que Condorcet, lui qui avouait franchement que, dans le plus grand nombre des cas, on obtenait ces titres plutôt par