Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/340

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portion, etc. Voilà les paroles sinistres qui jaillissaient périodiquement des états de situation de l’Hôtel-Dieu ; et cependant, répétons-le, les années s’écoulaient, et rien n’était changé à l’organisation du grand hôpital ! Pourquoi cette persistance à rester dans des conditions qui blessaient si ouvertement l’humanité ? Faut-il, avec Cabanis, qui, lui aussi, porta sur l’ancien Hôtel-Dieu un jugement sévère, « faut-il s’écrier que des abus reconnus de tout le monde, contre lesquels toutes les voix s’élèvent, ont des fauteurs secrets qui savent les défendre de manière à lasser le courage des gens de bien ? Faut-il parler d’esprits faux, de cœurs pervers qui semblent regarder les erreurs et les abus comme leur patrimoine ? » Osons l’avouer, Messieurs, le mal se fait d’ordinaire moins méchamment : il se fait sans l’intervention d’aucune passion forte ; par la vulgaire toute-puissance de la routine, de l’ignorance. J’aperçois la même pensée sous le langage calme et habilement circonspect de Bailly, dans ce passage de son rapport : « L’Hôtel-Dieu existe peut-être depuis le viie siècle, et si cet hôpital est le plus imparfait de tous, c’est parce qu’il est le plus ancien. Dès les premiers temps de cet établissement, on a cherché le bien, on a désiré de s’y tenir, et la constance a paru un devoir. De là, toute nouveauté utile a de la peine à s’y introduire ; toute réforme y est difficile ; c’est une administration nombreuse qu’il faut convaincre ; c’est une masse énorme qu’il faut remuer. »

L’énormité de la masse à remuer ne découragea pas les anciens commissaires de l’Académie. Que cette conduite serve d’exemple aux savants, aux administrateurs