Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/436

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force un individu appartenant à la classe la plus humble, la plus pauvre de la société. La colère ne lui fait pas oublier qu’il parle à un citoyen, à un homme. Je vous demande pardon, dit le premier magistrat de la capitale, en s’adressant à un chiffonnier ; je vous demande pardon si je me fâche ; mais votre conduite est si répréhensible, que je ne puis pas vous parler autrement.

Les amis de Bailly avaient coutume de dire qu’il consacrait une trop grande partie de son patrimoine au plaisir. Ce mot fut calomnieusement interprété. M. Mérard Saint-Just en a donné le vrai sens : « le plaisir de Bailly, c’était la bienfaisance. »

Un esprit aussi éminent ne pouvait manquer d’être tolérant. Tel, en effet, Bailly se montra constamment en politique, et, ce qui est presque aussi rare, en matière de religion. Dans le mois de juin 1791, il réprima sévèrement la fureur dont la multitude paraissait animée, sur le bruit qu’aux Théatins quelques personnes avaient communié deux ou trois fois le même jour. « Le fait est faux, sans doute, disait le maire de Paris ; mais quand il serait vrai, le public n’aurait pas le droit de s’en enquérir. Chacun doit avoir le libre choix de sa religion et de son dogme. » Rien n’aurait manqué au tableau, si Bailly eût pris la peine de remarquer combien il était étrange que ces violents scrupules contre les communions multiples émanassent de personnes qui probablement ne communiaient jamais.

Les Rapports sur le magnétisme animal, sur les hôpitaux, sur les abattoirs, avaient porté le nom de Bailly dans des régions d’où les courtisans savaient très-habile-