Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/537

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Eh bien, le Directoire se croyait en droit de faire une enquête pour découvrir si les consuls allaient à la messe ; et les consuls, au lieu de se refuser sur ce point à toute explication, au nom de la liberté de conscience, au nom de la dignité humaine ; au lieu de crier bien haut à l’inquisition, car l’inquisition peut exister sous divers masques, déclaraient avec une condescendance coupable que l’enquête était inutile ; qu’au surplus elle montrerait avec une entière évidence qu’on les avait calomniés ; que seulement, n’ayant pas réussi, à l’aide du raisonnement, à vaincre les préjugés de leurs femmes, de leurs enfants, ils croyaient, pour la paix du ménage (ceci est textuel), ne devoir point exiger impérativement qu’on rompît avec des habitudes invétérées.

Ainsi répondaient, en 1798, les consuls de la république romaine, à une dénonciation émanée des chefs de la république française. J’ai recueilli cette anecdote, moins encore pour la justification de nos deux confrères qu’afin de montrer, par un nouvel exemple, avec quelle lenteur l’esprit humain rompt les langes dont les siècles l’avaient enveloppé, avec quelle hésitation il marche à son émancipation définitive et vraiment libérale.

Je suis parvenu, j’espère, à décharger la mémoire de deux illustres membres de l’Institut du blâme qu’on avait voulu faire peser sur eux à l’occasion de la marche molle, indécise, souvent peu intelligente de la république romaine. La justification de Monge et de Daunou, s’il s’agissait de la chute du nouveau gouvernement, serait plus aisée encore.

La république périt le 9 frimaire an vii (le 29 novem-