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Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 2.djvu/679

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était la lecture quotidienne du futur géomètre. Vous savez maintenant comment notre confrère était devenu le répertoire vivant et fidèle de tous les événements de l’ordre militaire et de l’ordre civil qui marquèrent notre première Révolution. Vous savez aussi sous quelles influences se développèrent en lui les sentiments démocratiques qu’il professa publiquement dans sa jeunesse.

Les opinions de l’École polytechnique éprouvèrent diverses transformations suivant les circonstances extérieures. Lorsque Poisson y entra, elle était franchement républicaine. Autour de l’École, foyer de lumière, s’était groupé un certain nombre de personnes qu’on pouvait à bon droit appeler des socialistes, car leurs réflexions, leurs études, leurs systèmes, ne tendaient à rien moins qu’à une transformation radicale de la société. Au nombre de ces personnes, je citerai Clouet, Ferry, Champy et Saint-Simon, qui commençait déjà à devenir fameux par ses excentricités. Le bon sens précoce de Poisson lui fit adopter théoriquement tous les principes de la nouvelle École qui étaient conformes à la raison, et semblaient réalisables dans un temps plus ou moins éloigné, sans ébranler les deux pierres angulaires de la civilisation moderne : la propriété et la famille. Il repoussa en même temps du pied les momeries qui plus tard jetèrent tant de ridicule sur cette même École arrivée à son dernier degré de développement. Toutefois, les adeptes de Clouet et de Saint-Simon, suivant en cela un des préceptes du Coran, ayant décidé que chaque homme devait pratiquer un métier manuel, qui tailleur, qui cordonnier, qui menuisier, etc., Poisson fut appelé à faire un choix, et adopta