Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 3.djvu/13

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tiers pris la capote militaire et le fusil, mais sa tendresse filiale l’emporta ; il prouva qu’aux termes de la loi (il n’avait encore que quinze ans), il était dispensé d’aller rejoindre les défenseurs de la République, et on le laissa en repos.

Après le 9 thermidor, le père de Gay-Lussac, qui était heureusement resté dans les prisons de Saint-Léonard, recouvra la liberté. Le premier usage qu’il en fit fut de s’occuper de l’avenir du fils si bien doué qui lui avait donné pendant sa captivité les plus intelligentes preuves d’amour. Il l’envoya à Paris dans la pension de M. Savouret[1]. On était alors en 95 ; la disette, l’impossibilité de nourrir ses élèves, amenèrent M. Savouret à fermer son établissement. Gay-Lussac fut reçu bientôt après dans la pension de M. Sensier, laquelle, placée pendant quelque temps à Nanterre et ensuite à Passy, hors des murs d’enceinte de Paris, jouissait de quelques avantages dont les pensions de la capitale étaient alors privées.

J’ai rencontré récemment dans nos assemblées de vieux camarades de collége de Gay-Lussac, et tous en ont conservé les meilleurs souvenirs. L’un d’entre eux, M. Dorblay, représentant du peuple, me disait avec effusion : « Il était le modèle de ses condisciples ; jamais nous ne le vîmes, malgré sa vigueur exceptionnelle, se livrer contre aucun d’eux à un mouvement de vivacité ou d’impatience ; quant à son travail, il était incessant. » L’élève que ses parents avaient conduit au spectacle, et à qui on

  1. On voit que je regarde comme un devoir de conserver dans cette Biographie les noms de toutes les personnes qui ont eu des rapports avec notre ami pendant sa jeunesse.