Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 3.djvu/366

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

des sciences de Paris nouvellement créée, On a de lui une grande découverte bien constatée, qui suffira pour immortaliser son nom.

Des observations du premier satellite de Jupiter, faites par Rœmer et par Dominique Cassini, indiquèrent une inégalité que les deux savants astronomes crurent un moment pouvoir attribuer à la propagation successive de la lumière. Cassini rejeta bientôt cette idée si juste, Rœmer en maintint l'exactitude, et attacha ainsi son nom à une des plus grandes découvertes dont l'astronomie moderne puisse se glorifier.

Roëmer quitta la France comme Huygens à l'époque de la révocation de l'édit de Nantes, Frédéric IV le reçut avec une grande faveur, et lui conféra le titre de professeur royal. Plus tard, il fut nommé conseiller d'État et premier magistrat de Copenhague, emploi qu'il remplit pendant cinq années à la grande satisfaction du souverain et du public,

Condorcet fait à cette occasion les réflexions suivantes :

« Frédéric IV était heureusement supérieur à ce préjugé si commun dans les cours, que les savants sont incapables des places d'administration, comme si l'habitude de chercher la vérité ne pouvait pas tenir lieu de la routine qui s'acquiert dans les emplois subalternes. Si pourtant l'on prend l'esprit d'intrigue pour celui des affaires, et l'art de tromper ou d’opprimer les hommes pour celui de les gouverner, on a raison de croire que les savants n'y sont pas propres, et qu'une âme qui s'est longtemps nourrie de l’amour de la vérité et de la gloire, ne peut guère sentir la nécessité ni prendre l'habitude