Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 6.djvu/70

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

toutes les classes de la société, comme une chose naturelle et juste. Ceux qui n’ont fait leurs preuves en aucun genre jouissent du privilège incontesté de discourir sur toutes choses ; la voix d’un poëte, au contraire, semble déplacée à moins qu’on n’examine le budget de l’Université ; l’ingénieur est écouté avec défiance aussitôt qu’il ne parle plus de ponts, de canaux, de chemins de fer ; l’astronome, enfin, jouit a peine de la permission d’aborder, dans le budget de la marine, les articles des chronomètres, des boussoles, des instruments de précision. Pour moi, le droit d’examen et de discussion est la plus précieuse conquête de la philosophie, de la civilisation moderne. Celui-là seulement s’expose à la risée du public. qui procédant par de simples assertions, a l’air de se poser en face des grands maîtres comme leur égal. Après de convenables réserves quant à la forme, le terrain de la discussion doit être entièrement libre pour tous et contre tous. Dans nos académies, les œuvres des Galilée, des Descartes, des Newton, des Lavoisier, sont commentées sans cesse, même par de jeunes débutants. On fera bien de montrer la même tolérance à l’égard des Newton, des Lavoisier de la politique, quand il en surgira.

J’ai pris en très-bonne part le conseil qui m’a été donné de m’en fier aux autorités, mais seulement sur ce que je n’ai pas eu les moyens d’approfondir moi-même. Cependant, pour éviter toute confusion, je veux qu’on sache bien qu’à mon sens il ne suffit pas, pour être une véritable autorité en matière de fortification, d’avoir porté un uniforme quelconque d’infanterie ou de cavalerie ; d’avoir montré de la fermeté, de la hardiesse, du