Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 8.djvu/243

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entièrement bloquée par les glaces et ne put pas aborder. Cet état de choses persista, avec quelques variations, jusqu’en 1813 ou 1814. Alors une immense débâcle eut lieu, et la côte orientale du Groenland devint de nouveau libre. La détérioration des climats de l’Europe aurait donc tenu à l’existence permanente d’une vaste plaine de glace qui, en latitude, se serait étendue depuis le cap Farewell jusqu’au cercle polaire arctique.

Je renverserai cette explication de fond en comble, en faisant remarquer que les documents sur lesquels je me suis appuyé pour prouver qu’en Vivarais et en Bourgogne les chaleurs étaient jadis très-fortes que ces documents, dis-je, sont d’environ un siècle et demi postérieurs à la date de la formation de la plaine de glace groenlandaise. J’ajouterai que la débâcle, à peu près complète, que ces glaces ont éprouvée en 1814 n’a occasionné, dans nos climats, ni de ces changements notables que les phénomènes agricoles révéleraient à tout le monde, ni même aucune des légères modifications dont les seuls instruments météorologiques pourraient avertir les physiciens.

Voyons, maintenant, si la cause cherchée de la variation de nos climats n’est pas près de nous ; si cette variation ne dépendrait point exclusivement des travaux que les besoins et les caprices d’une population sans cesse croissante ont fait exécuter sur mille points du territoire.

L’ancienne France, comparée à la France actuelle, nous offrirait une étendue de forets incomparablement plus grande ; des montagnes presque toutes boisées ; des lacs intérieurs, des étangs, des marécages sans nombre ; des rivières dont aucune digue artificielle n’empêchait le