Page:Arago - Œuvres complètes de François Arago, secrétaire perpétuel de l’académie des sciences, tome 8.djvu/273

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voitures chargées, et que les chevaux circulaient sur le Rhin comme sur la terre ferme. On vit dans le Brabant un fait singulier les anguilles, chassées en quantité innombrable de leurs marécages par la gelée, se réfugièrent dans les granges où elles se cachèrent; mais le froid était tel qu'elles y périrent faute de nourriture et se putréfièrent. Le bétail mourut dans beaucoup de contrées. Les intempéries se prolongèrent tellement que les arbres ne prirent leurs feuilles qu'en mal, et que les céréales et les autres plantes cultivées ne commencèrent à végéter avec vigueur qu'à cette même époque. (Guillelmi de Nangiaco Chronicon.
1125. L'hiver fut encore rigoureux cette année, le printemps malsain, et il en résulta en France uno cruelle famine. En Bohême les arbres éclatèrent par le froid et les fleuves se congelérent. (Annales brunwilarenses et fossenses.)
1133. Cet hiver fut extrêmement rigoureux en Italie. Le Pô gela depuis Crémone jusqu'à la mer ; une quantité immense de neige couvrit les chemins ; toutes les rivières et les ruisseaux gelèrent ; il n'y eut pas jusqu'au vin qui gela aussi ; les chênes et les noyers se fendirent avec bruit[1] et furent déchirés ; les oliviers et les ceps séchèrent. Il y eut une disette affreuse, au point que l'année suivante dans le territoire de Padoue les hommes furent obligés de se nourrir d'herbe. (Toaldo.)
1143. L'hiver fut rigoureux en France et en Allemagne; une neige très-épaisse couvrit la terre du commencement de décembre jusqu'en février; un ouragan terrible renversa des maisons et des églises; le dégel et la fonte des neiges amenèrent des inondations. En Allemagne les arbres se fendirent et les vignes furent desséchées. La famine continua à décimer les hommes. (Annales laubienses et Guillaume de Nangis.)
1149. Cet hiver fut plus rude que d'ordinaire dans les Flandres et dura depuis le commencement de décembre jusqu'en mars. Les eaux de la mer étalent complétement gelées et praticables dans une distance de plus de trois milles à partir du rivage; les vagues, qui s'étaient solidifiées, apparaissaient de loin comme des tours. Il y eut à Tournai une grande disette
  1. 1. Duhamel da Monceau a noté le même phénomène en janvier 1776, par un froid qui était descendu à À Strasbourg, par les arbres se fendaient du haut en bas ; à Lyon, les gens de la campagne entendaient les arbres éclater avec bruit : il y avait eu