Page:Arbois de Jubainville - Cours de littérature celtique, tome 1.djvu/36

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
33
CELTES ET LANGUES CELTIQUES.

dans l’histoire. Un des monuments du plus ancien cycle héroïque nous montre le druide Cathbad (Cathbad, drui) se promenant, entouré de ses élèves, auprès de la royale forteresse d’Émain, capitale de l’Ulster ; ce qu’il enseigne à ces jeunes gens, c’est la science druidique (druidecht), et il prédit le brillant avenir réservé à Cûchulainn, héros de cette épopée[1]. Quand, avec saint Patrice, l’histoire et la légende chrétienne succèdent à la littérature épique, le druidisme est encore vivant : des druides prédisent, dit-on, l’arrivée de Patrice ; le roi suprême d’Irlande a deux filles, et leur éducation est confiée à deux druides dont l’histoire nous a transmis les noms. Une fois le christianisme introduit, les druides conservèrent pendant plus d’un siècle leur situation officielle, rivale de celle du clergé chrétien, qui leur faisait une guerre impitoyable. Ils succombèrent avec Tara, capitale de l’Irlande, qui, frappée de malédiction par le clergé chrétien, fut abandonnée par les rois vers l’année 560[2]. Alors

  1. Leabhar nah Uidhre, ms. de la fin du onzième siècle, publié en fac-similé par l’Académie royale d’Irlande sous la direction de M. Gilbert, p. 61, col. 1. — Livre de Leinster, ms. du milieu du douzième siècle, publié en fac-similé par l’Académie royale d’Irlande, avec une savante introduction de M. R. Atkinson, p. 64, col. 2. O’Curry a donné une traduction anglaise de ce passage d’après le Leabhar nah Uidhre, dans Manners and customs of the ancient Irish, t. II, p. 363.
  2. « Coena postrema - i - Temra la Diarmait mac Cerbail » Chronicon Scotorum, sub anno 560, édition Hennessy, p. 52. C’est la reproduction à peu près exacte de ce qu’on trouve sous la même date dans les Annales de Tigernach : « Cena postrema Temrach la Diarmait mac Cerbuil » O’Conor, Rerum hiberaicarum scriptores, t. II, p. 141. Sur les causes de l’abandon de Tara, voir Petrie, On the history and antiquities of Tara hill, p. 125 et suiv.