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Page:Archives parlementaires de 1787 à 1860, Première Série, Tome IX.djvu/212

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[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [29 septembre 1789.]

prend à l'Assemblée que le grand vicaire de la maison, ainsi appelé par arrêt du grand conseil de 1705, est ici, et demande à entrer dans la salle pour rendre compte de tous les détails de cet événement.

M. Camus s'élève aussi contre le mot satisfaction. 11 prétend que Saint-Martin-des-Champs, en offrant les biens de son ordre, ressemble à un homme qui offrirait les maisons de son voisin.

M. l'abbé Grégoire craint que les expressions vagues du procès-verbal ne préjugent la grande question de la propriété des biens ecclésiastiques. On demande à aller aux voix sur le procès-verbal.

M. le Président pose ainsi la question : « retranchera-t-on la phrase du procès-verbal ? » Une première épreuve est douteuse.

M. de Volney se plaint du tumulte de cette discussion. Messieurs, dit-il, tant que vous agiterez ainsi une question de cette nature, vous ne parviendrez jamais à votre but ; elle doit se discuter franchement, et il est temps de cesser de la couvrir du voile mystérieux dont elle a toujours été enveloppée jusqu'ici. Il faut d'abord discuter la grande question de savoir à qui appartiennent les biens du clergé ; il sera ensuite facile de discuter les droits des usufruitiers.

M. le comte de Mirabeau. J'approuve la doctrine de M. de Volney, mais je dis qu'il est hors de la question. Il s'agit ici de la certitude d'un fait, c'est que plus de huit cents personnes ont, par les applaudissements les plus bruyants, approuvé la lettre de messieurs de Saint-Martin-des-Champs ; vouloir soutenir le contraire, c'est nier l'évidence. Je demande donc que la question soit ajournée et que l'on rentre dans l'ordre du jour, ou qu'on laisse dans le procès-verbal des termes qui sont vrais et que tout le monde doit approuver.

M. le Président procède à une seconde épreuve ; elle est très-douteuse. M. le président hésite de prononcer ; cependant plusieurs membres lui ayant demandé son avis, il croit qu'elle est en faveur de la phrase énoncée dans le procès-verbal.

Divers députés du clergé demandent l'appel nominal.

M. l'abbé Grégoire dit que c'est faire un cercle vicieux.

M. Target représente que la bonne foi des membres rendra justice à la majorité, et il demande qu'on aille aux voix par assis et levé pour savoir de quel côté est la majorité.

M. le Président cite le règlement qui porte que l'on ira aux voix toutes les fols qu'il y aura du doute. Ou va aux voix pour savoir si ce doute existe. A l'exception du clergé, tous les membres se lèvent pour assurer que la majorité est en faveur de la rédaction du procès verbal.

M. Thouret au nom du nouveau comité de constitution, fait à l'Assemblée nationale un rapport sur les bases de la représentation proportionnelle.

Messieurs, le travail que votre nouveau comité a l'honneur de vous soumettre, tient, par un double rapport, à deux grandes parties de la Constitution.

D'une part, vous organisez le gouvernement représentatif, le seul qui convienne à un peuple libre ; mais sa justice et sa stabilité dépendent de l'établissement de l'égalité proportionnelle dans la représentation, et d'un ordre fixe et simple dans les élections.

D'autre part, vous voulez fonder un nouveau système d'administration, municipale et provinciale. Cette administration, également représentative exige de même, et la représentation proportionnelle, et un ordre pour les élections.

Cette similitude entre les deux objets établit, par la nature de la chose même, l'importance de fonder sur des bases communes le double édifice de la représentation nationale, et de l'administration municipale et provinciale.

Cette vérité, si propre tout à la fois, à affermir les différentes parties de la Constitution, en les liant l'une à l'autre, et à faciliter pour toujours l'exécution en la simplifiant, est la première qui nous a frappés. En suivant le fil qu'elle présente, nous sommes arrivés à la conviction que l'organisation de chaque grand district du royaume doit être constituée de manière qu'elle serve en même temps et à la formation du Corps législatif, et à celle des diverses classes d'assemblées administratives. C'est ainsi que d'un ressort commun partiront tous les mouvements du corps politique ; par là, la conservation de ce ressort unique sera d'autant plus chère au peuple, qu'en le perdant il perdrait tous les avantages de sa Constitution ; par là, sa destruction deviendrait plus difficile à l'autorité, qui ne pourrait le rompre qu'en désorganisant entièrement l'Etat.

Le comité a pensé que les bases de la représentation doivent être, autant qu'il est possible, en raison composée du territoire, de la population et des contributions. Avant de dire comment ces trois bases peuvent se combiner pour établir entre les divers districts électeurs la juste proportion de leurs députations, il est nécessaire de présenter, sur chacune des trois, quelques développements particuliers.

Base territoriale.

Le royaume est partagé en autant de divisions différentes qu'il y a de diverses espèces de régimes ou de pouvoirs : en diocèses, sous le rapport ecclésiastique ; en gouvernements, sous le rapport militaire ; en généralités, sous le rapport administratif ; en bailliages, sous le rapport judiciaire.

Aucune de ces divisions ne peut être ni utilement ni convenablement appliquée à l'ordre représentatif. Non-seulement il y a des disproportions trop fortes en étendue de territoire, mais ces antiques divisions, qu'aucune combinaison politique n'a déterminées, et que l'habitude seule peut rendre tolérables, sont vicieuses sous plusieurs rapports tant publics que locaux.

Mais puisque l'ordre que la Constitution va établir est une chose nouvelle, pourquoi l'asservirions-nous à des imperfections anciennes qui en contrarient l'esprit, et qui en gêneraient les effets, lorsque la raison et l'utilité publique commandent d'éviter ce double écueil ? Le comité a donc pensé qu'il est devenu indispensable de par-