Page:Ardouin-Dumazet, Voyage en France 10,1897.djvu/357

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inoubliable qui disparaît bientôt, la route pénétrant dans de noirs ravins de schiste et de boues, dont les parois sont maintenues par de jeunes plantations. Sur les points où la culture est possible, des champs de lentilles ne sont point encore moissonnés ; personne n’y travaille malgré la maturité de la graine, mais la récolte doit se faire avant le lever du soleil quand la gousse humide de rosée ne peut s’ouvrir. Les cultures sont maigres sur les versants non érodés, cela tient à la rareté des engrais et au défaut d’irrigation. Il y a beaucoup de jachères ; sans les groupes de noyers annonçant un climat plus clément, ces abords du Trièves seraient tristes. Encore détruit-on ces beaux arbres : des industriels installés dans le pays les achètent ; une fois les noyers abattus, on ne les remplace pas.

Aussi ce versant de l’Obiou contraste-t-il avec les lointains horizons du pays de Beaumont, allongé sous le massif de monts boisés ou couverts de pâturages, sur lequel on aperçoit l’église et le couvent de la Salette. Ce beau canton se présente comme une longue corbeille de verdure, grâce à son canal et à ses bois. Saint-Laurent, principal centre du riche terroir, semble, vu d’ici, une ville considérable enchâssée dans les prairies et les moissons blondes.