Page:Ardouin-Dumazet, Voyage en France 10,1897.djvu/63

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Encore un peu d’efforts, une ascension par des prairies marécageuses et nous atteignons enfin le col de Bornette. Une vallée profonde, très boisée, s’étend au-dessous de nous ; elle se termine vers un bassin d’eaux étincelantes encadré de monts superbes ; c’est l’extrémité du lac d’Annecy.

Nous renvoyons nos mulets et reprenons nos sacs. En avant pour cette descente si facile en apparence ! Hélas ! pas de chemin tracé, mais un sentier fangeux où l’on enfonce à mi-jambe, puis la forêt sombre, aux arbres énormes parfois. Et, là-dessous, longeant ou traversant un torrent clair, mais profond, une piste tracée dans le rocher, très déclive, encombrée de blocs sur lesquels on glisse à chaque pas. Le ciel s’est couvert, la pluie tombe avec violence, le tonnerre gronde, répercuté par les échos dans la montagne du Charbon. Arriverons-nous avant la nuit ?

Cette crainte nous talonne, car la veillée serait plutôt morose sous la voûte sombre des sapins. Enfin voici une clairière, des pâturages, un petit hameau, une scierie dont les grincements nous paraissent joyeuse musique, puis un beau chemin bien ferré, courant dans une riante campagne. À la nuit nous atteignons le grand village de Doussard, d’où nous comptions gagner le port du Bout-du-Lac et le bateau d’Annecy.