Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 1.djvu/326

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←enfans de cette classe ; et l’adresse rédigée par Juste Chanlatte, signée de lui, de Pinchinat, de Bauvais, etc., ne les excitait que trop à ces actes : — détruisons nos tyrans, plongeons nos bras ensanglantés, vengeurs du parjure et de la perfidie, dans le sein de ces monstres d’Europe, telles furent les instructions dictées par les chefs de la classe de couleur. Ceux du Sud les prirent à la lettre, tandis que ces chefs, disons-le à leur honneur, agirent différemment qu’ils ne l’ordonnaient : ils surent mettre dans leurs actions, dans leur conduite, une louable modération qui ne se trouve pas certainement dans leur adresse.

Et Garran ne dit-il pas encore, à la page 533 du 2e volume de son rapport : — « Si ces atrocités paraissent peu conformes à ce que l’on a dit des hommes de couleur au commencement de cet ouvrage, on doit songer que les funestes exemples des brigands du Port-au-Prince et du Trou-Coffi n’avaient été que trop propres à les démoraliser… » Et à la page 536 : — De leur côté les blancs {dans le Sud) traitaient les hommes de couleur avec une grande barbarie : ils ne faisaient aucune grâce aux prisonniers… Partout des commissions prévôtales (comme dans le Nord) jugeaient ceux qui avaient été pris les armes à la main, et les condamnaient aux supplices les plus cruels, après les avoir appliqués à la question ordinaire et extraordinaire. Un des chefs des hommes de couleur, nommé Bleck, fut ainsi brûlé vif, quoique la procédure instruite contre lui, et son procès-verbal de torture en particulier, n’indiquent pas même qu’on lui eût reproché d’avoir commis personnellement des atrocités ou des incendies…[1] »

  1. Joseph Bleck, né Saint-Louis du Sud, avait été élevé à Bordeaux, où