Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 1.djvu/46

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perpétuer dans leurs places et en obtenir de nouvelles… Les états-majors furent supprimés et le calme rétabli… Cependant, par une ordonnance du 15 mars 1769, les états-majors ont été rétablis avec les mêmes fonctions qu’autrefois… les abus se sont reproduits…

» Si la liberté de l’homme social consiste à n’être gouverné que par les lois, il n’y a point de liberté à Saint-Domingue, puisqu’il n’y a point de législation, et que les hommes y sont soumis aux décisions de quelques officiers qui ne savent aucune espèce de lois, et font profession de les mépriser toutes

» C’est en se mêlant de toutes les affaires, que les généraux, les commandant en second, les lieutenans de roi et leurs sous-ordres, traitent souvent les colons avec dureté. Ce n’est point assez d’ouvrir les prisons, les cachots ; sous prétexte de milices, ou de secret militaire, de police ou de dettes, on leur fait éprouver des outrages sanglans et publics, on les accable d’invectives et d’injures…

» Aux menaces, aux injures, plusieurs officiers joignent l’ivresse de la colère et descendent aux juremens les plus grossiers ; c’est abuser dangereusement de l’autorité du monarque…

» Rien ne pouvait être plus favorable à l’accroissement du pouvoir militaire, que le rétablissement des milices dans la forme actuelle ; chaque habitant est subordonné, même dans l’état civil, à autant de supérieurs que peut en avoir un soldat ; et le malheur des conjonctures, en éloignant des places d’officier et de commandant les plus riches colons, a bouleversé et changé les déférences que les mercenaires et les agens du commerce doivent naturellement aux propriétaires des grandes habitations.