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Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 1.djvu/60

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bliques, d’attroupemens, de cantiques ni de sermons pour eux ; mais il y a toujours des catéchismes… »

Ces aveux d’Hilliard d’Auberteuil sont extrêmement précieux ; ils nous dépeignent la misérable condition des noirs dans l’esclavage, tout en établissant leur droit à un traitement plus doux ; car il les reconnaît bons et faciles à conduire laborieux et intelligens, sobres et patiens, en même temps qu’il ne dissimule pas les injustices, la tyrannie, la cruauté de la plupart des maîtres. Que penser, en effet, de ces colons qui n’aimaient pas à voir les femmes esclaves enceintes, qui forçaient ces infortunées à se faire avorter ! Que dire de ces maîtres qui gardèrent un homme pendant 87 ans dans l’esclavage, alors qu’il était le père commun d’une famille de 53 individus !

Par l’article 2 du code noir, Louis XIV ordonnait de faire instruire les esclaves dans la religion chrétienne : son successeur immédiat renouvela cette prescription ; mais les maîtres se refusèrent à l’exécution de cette disposition. Ainsi, la religion du Sauveur qui enseigne la patience et la résignation à ceux qui souffrent, qui moralise les hommes, fut jugée par ces despotes cruels, nuisible à leur prétendu droit de propriété ; et le mariage, cet acte qui contribue tant à la pureté des mœurs, à l’esprit de famille, à la paix des États, à la conservation et à la propagation de l’espèce humaine, le mariage fut proscrit par eux ! Ces maîtres qui donnaient eux-mêmes le pernicieux exemple du libertinage, du concubinage, pouvaient-ils, en effet, permettre, encourager la sainteté des unions légitimes parmi leurs esclaves, et les porter ainsi à condamner leurs propres mœurs ?

On peut inférer de l’ouvrage que nous citons, comme