Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 11.djvu/327

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forte raison, les États-Unis. « Je crois donc, Président, que c’est en Europe qu’il vous faudrait choisir un séjour. À votre âge et avec votre tempérament, le midi de la France serait convenable, car vous êtes très-frileux ; mais s’il survient des difficultés entre la France et Haïti, par la mauvaise administration des révolutionnaires, ils seraient capables de croire que vous y avez contribué. L’Italie me paraît le seul pays que vous deviez habiter, en Toscane, par exemple, où la vie est à bon marché. L’Italie est la patrie des arts : elle vous offrirait en outre mille agrémens dans votre retraite philosophique. Là, sous un ciel clément, vous pourriez écrire vos mémoires, continuer ceux que vous avez déjà commencés, d’après ce que je vous ai entendu dire une fois. »

Le Président approuva cette idée. « Mais, comment me rendre en Italie, au moment où il me faudrait sortir d’ici ? »

« Vous me pardonnerez, Président, lui répondis-je, d’avoir causé de cette éventualité avec un personnage étranger, qui m’a chargé de vous faire des offres à ce sujet, avec beaucoup de bienveillance et d’estime pour vous. — Qui donc ? — M. Ussher, le consul anglais. » Et je lui dis ma conversation avec ce consul. « Cela ne m’étonne pas de sa part, me répondit Boyer, et je lui en sais d’autant plus gré, qu’il justifie ainsi la bonne opinion que j’ai conçue de lui : je l’ai toujours distingué parmi les agents étrangers qui sont ici. C’est bien : je verrai plus tard si je devrai accepter ses offres. »

Le 10 mars, une sorte de conseil de guerre fut tenu au palais, et j’y concourus. L’objet en était plutôt politique, selon que j’en jugeai par l’attitude du Président. Il était informé qu’une active propagande d’idées révolutionnaires