Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 2.djvu/269

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avait été témoin de toutes les opérations antérieures de ses collègues, il avait assisté à toutes leurs délibérations concernant le maintien de l’esclavage, il avait écrit sous leur dictée la plupart de leurs résolutions dans ce but, et il les savait sincères. Delpech pouvait donc ne pas partager leurs convictions nouvelles sur l’opportunité de la mesure, et même sur sa légalité. N’avait-il pas une excuse pour ses opinions, dans le dissentiment qui existait à ce sujet entre Polvérel et Sonthonax ? Sa lettre du 12 septembre leur expliquait suffisamment sa pensée.

C’est donc avec regret que nous lisons dans Garran, que Polvérel, après avoir rendu justice aux principes de Delpech, dans sa proclamation du 4 septembre, attribue ses doutes à la pusillanimité, à la vanité, à l’envie, et dit qu’il mourut un mois trop tard, tout en rappelant qu’il était honnête homme et bon citoyen. Pour être l’un et l’autre, il faut posséder bien des qualités ! Et sa proclamation où il faisait aux esclaves de l’Ouest, une si pénible comparaison de son système d’affranchissement avec celui de Sonthonax, n’avait-elle pas pu fournir à ce dernier une occasion de l’accuser lui-même de vanité et d’envie ? Qui sait si cette proclamation n’a pas influé sur la froideur qui se réveilla entre eux, et qui fut cause de tant de fautes de la part de Sonthonax ?

Nous nous rangeons par ces motifs à l’avis de la commission des colonies, qui considéra la mort de Delpech comme un malheur pour Saint-Domingue, eu égard aux circonstances de cette époque, et nous nous associons aux regrets qu’elle occasionna.