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qui l’avait remis en liberté, et qui s’en faisait un agent. Halaou était préparé à l’admiration, et Sonthonax lui-même (car il était homme) à consentir volontiers à être une idole. Nous le disons avec conviction, parce que Sonthonax, dans la suite, nous apparaîtra faible sur le chapitre des caresses, des adulations des noirs ; nous le verrons en face d’un noir adroit et éclairé, et nous tâcherons d’esquisser ce tableau.

Halaou vint donc au Port-au-Prince, le 9 février : ses bandes formaient une armée. Ce pouvaient être des hôtes dangereux pour la ville où il y avait si peu de troupes. Sonthonax dut paraître devant elles et leur chef, avec tout l’appareil de la puissance nationale, tout le prestige de sa brillante renommée. Il fut au-devant d’Halaou, le félicita pour mieux le fasciner par son ascendant, le dominer avec les siens et leur donner à tous une bonne direction, pour défendre la colonie, pour défendre leur liberté ; car cette dernière cause surtout était menacée.

Nous n’ignorons pas que nos traditions rapportent, que Sonthonax parla mystérieusement à Halaou, à l’oreille, et qu’il l’exhorta à retourner à la Croix-des-Bouquets pour assassiner Bauvais, après un repas qu’il lui fît servir et auquel il assista lui-même, en se plaçant à table à côté de ce noir. Mais en étudiant notre histoire nationale, nous nous gardons de suivre toutes les traditions populaires si souvent erronées.

Après le repas donné au palais du gouvernement, Halaou et ses bandes vidèrent le Port-au-Prince, et se rendirent à la Croix-des-Bouquets.

Nous concevons que, durant leur présence en ville, Montbrun, essentiellement militaire, ait fait prendre une attitude martiale à la légion de l’Ouest ; mais nous n’ad--