Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 2.djvu/390

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ment les hommes de couleur contre les colons, parce que c’était se défendre lui-même, pour les avoir si puissamment aidés à jouir des bénéfices de la loi du 4 avril.

S’il faut lui rendre justice à cet égard, ne doit-on pas rendre justice également aux hommes de couleur pour leur conduite au Cap, lorsque les Daugy, les Raboteau, les Larchevesque Thibaud et consorts tramaient contre lui afin de le déporter ? Ne fut-ce pas à Pinchinat, à Louis Boisrond et aux autres membres de la commission intermédiaire, qu’il dut le concours de ceux de cette classe ? Ne rendit-il pas justice à Pinchinat, en cette occasion, en écrivant à la convention nationale ? Leur intérêt politique était sans doute de soutenir le commissaire civil contre les colons ; mais l’intérêt de la position de celui-ci était aussi de s’appuyer sur eux, de les soutenir pour ne pas être renversé lui-même. Au 20 juin, dans cette même ville du Cap, ces hommes le défendirent courageusement contre Galbaud et ses hordes de forcenés. Sans eux, les noirs insurgés, indisciplinés, appelés alors, n’eussent pas seuls suffi à repousser Galbaud. Si, à son passage à Saint-Marc, Savary et tant d’autres se montrèrent perfides envers lui, ce n’était pas une raison pour se méfier de ceux du Port-au-Prince, au point de vouloir se créer une force contre eux, par l’imprudent enrôlement des anciens sicaires de Praloto dans le régiment d’Artois, qu’il avait signalés et flétris par sa proclamation, datée de Saint-Marc le 21 mars 1793. De ce que les officiers blancs, dans le Nord, trahirent la cause de la France, il ne se montra pas méfiant envers Laveaux, Pageot, Desfourneaux et tant d’autres qui honorèrent, par leur fidélité, le glorieux drapeau de leur pays. Pourquoi cette distinction entre les