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espèce de protestation anticipée contre les événemens qui vont arriver, était à l’adresse de B. Borgella, de Borel et de Hanus de Jumécourt dont on pressentait les desseins. Ces hommes, dans cette circonstance, jouaient cette espèce de comédie, précurseur de scènes tragiques, avec cet aplomb de déloyauté que les colons ont presque toujours montré, lorsqu’ils se préparaient aux meurtres dont ils donnèrent si souvent le spectacle à Saint-Domingue.


Le projet de confédération conçu par eux consistait à faire nommer deux commissaires par chacune des paroisses de l’Ouest, pour se réunir au Port-au-Prince le 20 janvier 1793. Le but avoué de cette réunion par la municipalité, était « le désir de mettre le sceau à l’indissoluble fraternité qui devait désormais exister entre tous les hommes libres de la colonie : les mêmes commissaires devaient réitérer, en présence de tous les citoyens, le serment d’achever, par leurs exemples et par leurs efforts réunis, la pacification de toutes les parties de l’Ouest, l’oubli de toutes les divisions et de toutes les opinions, pour faire concourir à l’avenir toutes les volontés à un seul but, le bonheur de tous les habitans de la dépendance. » À cet aveu insidieux, publié dans les journaux, on ajouta secrètement, dans les invitations faites aux municipalités des paroisses « qu’il s’agissait de former un corps politique qui délibérerait sur l’organisation définitive et légale de toutes les parties de l’administration, sur les secours promis et consacrés au rétablissement de la tranquillité, et sur le nouvel ordre de choses que la convention nationale avait établi en France, depuis le mois d’août[1]. » C’est-à-dire, sur

  1. Rapport, t. 3, p. 296 et 297.