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pouvait faire l’éloge des officiers et soldats soumis à leurs ordres.

L’injustice systématique des supérieurs à l’égard de leurs subordonnés, militaires ou civils, est toujours une chose odieuse. Les hommes, en général, ne peuvent être poussés au bien, que lorsque leur juste amour-propre obtient la satisfaction qui lui est due. Les esprits supérieurs savent sans doute se mettre au-dessus de ces petites passions des chefs ; mais il est de leur devoir de créer, d’entretenir une noble émulation parmi ceux qu’ils gouvernent.


Nous voilà enfin arrivé à la fameuse affaire du 30 ventôse, coupable aux yeux de la loi, cause de fautes nombreuses et de crimes politiques dont les résultats s’enchaînèrent successivement. Quoique nous ayons cité déjà bien des faits et des actes qui expliquent comment elle a été préparée, il nous faut encore en citer pour mieux la faire comprendre et la juger.

Suivant le rapport de Marec, dès le 24 nivôse an 4 (14 janvier 1796), Laveaux écrivait au président du comité de salut public ; il n’existait plus, on ignorait à Saint-Domingue l’installation du Directoire exécutif :

« Il existe ici (au Cap) de mauvaises têtes qui travaillent » à faire naître l’indépendance, qui publient que la colonie n’a aucun besoin de la France. Je citerai Rodrigue (blanc), chef de brigade du 1er régiment des troupes noires. C’est lui qui se montre chef de ce parti.  »

Cette dénonciation était le résultat de la conversation qui eut lieu chez Martinet, où nous avons vu Laveaux manquer si essentiellement à ses devoirs comme gouverneur général : de son aveu, ce ne sont pas les mulâtres qui étaient à la tête du parti.