Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 3.djvu/268

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

port mensonger a été envoyé par l’agence, au Directoire exécutif ; et Pinchinat n’a pu se faire écouter en France, par la suite ! Leborgne et Sonthonax l’y ont poursuivi avec acharnement.

Le 10 septembre, les citoyens des Cayes firent une adresse à Roume, où ils exposèrent les faits survenus depuis l’arrivée de la délégation : ils y protestaient de leur dévouement à la France, en priant cet agent de venir parmi eux pour consolider l’ordre par sa présence. Mais les députés qu’ils envoyèrent auprès de lui n’étant arrivés à Santo-Domingo, qu’après le passage de Leborgne et de Kerverseau dans cette ville, Roume ne voulut point recevoir ces députés ni l’adresse dont ils étaient porteurs. Il accueillit des blancs qui quittèrent les Cayes après les événemens de fructidor, et qui lui relatèrent les choses comme Leborgne les avait présentées. Cette circonstance expliquera plus tard la conduite de Roume à l’égard de Rigaud, quand celui-ci sera en dissension avec T. Louverture.

Le 12, le calme étant tout-à-fait rétabli aux Cayes, Rigaud émit une proclamation où il rappelait à la population, les mesures qu’il avait prises pour sauvegarder les personnes et les propriétés. Il y faisait un appel aux hommes de couleur, aux blancs, aux noirs, pour les inviter tous à la concorde. Aux premiers, il rappelait les calomnies dont ils étaient l’objet de la part des méchans : « C’est en prêchant l’égalité, que ces hommes pervers veulent anéantir votre caste ; les succès qu’ils ont obtenus dans le Nord, leur donnent l’espoir d’y parvenir facilement dans le Sud et dans l’Ouest ; mais ils se trompent, soyez en certains. »[1]

  1. L’espoir qui animait Rigaud ne comptait pas assez avec la politique européenne : ses illusions lurent dissipées en 1799 et 1800.