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l’influence des prêtres et des émigrés, c’est-à-dire, des colons qui étaient rentrés dans la colonie après avoir été considérés comme émigrés ; et il a cité surtout Salnave et Bayon de Libertas. À eux se joignirent naturellement tous les autres blancs colons alors à Saint-Domingue, dans le Nord et l’Artibonite. L’accusation même que le général en chef porta contre Sonthonax, en disant qu’il lui avait proposé d’égorger tous les Européens, devait les rallier tous auprès de lui. Ils commencèrent dès-lors ce plan de cajoleries, de feinte admiration, de prétendu attachement pour sa personne, qui le perdit par la suite. Il avait plusieurs fois, sous le gouvernement de Laveaux, appelé des prêtres auprès de lui pour baptiser les enfans aux Gonaïves : dans une circonstance où il opéra un échange de prisonniers avec le commandant anglais à Saint-Marc, il sollicita de lui de laisser venir les anciens curés des Gonaïves et d’Ennery qui s’y trouvaient. Cette louable attention qu’il mit à procurer à la population les secours de la religion, contribua encore à faire voir en T. Louverture, l’homme qui convenait au gouvernement de la colonie où il venait de se placer. C’est alors, il paraît, que les colons du bourg d’Ennery imaginèrent de substituer au nom de cet ancien gouverneur de Saint-Domingue, sous lequel ce canton fut érigé en paroisse, le nom de Louverture, à cause de l’habitation qu’il y avait acquise de ses deniers, depuis sa soumission à Laveaux. Un pareil acte dut gagner T. Louverture, par l’effet de sa vanité, et lui faire peut être entrevoir dans l’avenir la possibilité de devenir aussi, comme le comte d’Ennery, gouverneur général de Saint-Domingue.

De leur côté, les Anglais, reconnaissant l’impossibilité, non plus de conquérir Saint-Domingue, mais de conserver