que averti des instructions données à Hédouville contre lui, prévenu cependant en faveur de cet agent, par Pinchinat dont il connaissait les lumières et le dévouement à sa personne, sachant que Bonnet avait fait des démarches aussi à Paris pour éclairer le gouvernement sur ses sentimens d’attachement à la métropole, sentant qu’il avait droit au moins à l’estime d’Hédouville par ses dernières opérations militaires depuis le commencement de cette année, Rigaud devait espérer d’être mieux compris, mieux apprécié par lui qu’il ne l’avait été par les précédens agens. Sa lettre à Roume, du 28 avril, exprimait déjà cet espoir. L’accueil qu’il venait de faire dans le Sud aux cinq officiers envoyés par Hédouville était encore une recommandation en sa faveur. Il ne pouvait donc que mettre tous ses soins à le persuader de son dévouement.
Dans cet esprit différent, T. Louverture et Rigaud se présentèrent tous deux devant Hédouville.
Leurs antécédens, l’actualité de leurs sentimens se peignaient, pour ainsi dire, sur leur personne.
T. Louverture, que l’agent avait déjà vu, mal partagé par la nature, était petit de taille, laid de figure, nasillard, quoique ayant d’ailleurs le feu de l’intelligence dans les yeux, l’éclat du génie dans les regards. Au désavantage de sa nature physique et de ses antécédens moraux et politiques, il joignait en ce moment-là toute la contrainte d’un personnage qui se voyait obligé de se soumettre à une autorité plus élevée, et qui était secrètement mécontent. Quelle que fût sa dissimulation, il était impossible qu’il ne laissât pas voir sa contrainte.
Rigaud, au contraire, quoique d’une taille ordinaire, avait une figure attrayante, une physionomie ouverte qui prévenait en sa faveur, un air martial néanmoins, la tour-