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lorsque ses collègues arrivent sur le théâtre même des événemens.

Dès-lors tout espoir de modération et d’indulgence s’évanouit ; car les vaisseaux français ont porté dans leurs flancs un ange de discorde. C’est Sonthonax, ancien commissaire civil, vainqueur dans sa lutte contre les colons. Le gouverneur général, flétri dans son autorité, a été sa créature ; en partant prisonnier de la France, il lui avait suggéré ses préventions contre la classe éclairée de la population noire dont le gouverneur général se plaint en ce moment.

Cet ancien commissaire, président de la nouvelle commission civile, se targue de son passé, se rappelle qu’il a été le premier à proclamer la liberté générale des esclaves ; il se croit une idole pour ces nouveaux libres. Il trouve les circonstances propices à ses rancunes, à ses vues personnelles ; il se fonde encore sur les instructions secrètes que l’agence a reçues du Directoire exécutif. Il s’abandonne alors à toute la fougue de son caractère, pour exercer ses rancunes et ses vengeances.

Sonthonax trouve dans la violence de Leblanc, dans la bonhomie passive de Giraud, dans la nullité politique et la coupable condescendance de J. Raymond, tous les élémens d’une direction des affaires vers les agitations et les injustices : il s’empare de cette direction.

L’agence est chargée de porter dans la colonie la nouvelle constitution de la République française, qui consacre tous les droits des hommes qui en composent la population ; mais elle ajourne la publication de ce pacte social, afin de pouvoir exercer une autorité dictatoriale, arbitraire. L’absolutisme de Sonthonax ne peut en connaître* en exercer d’autre ; il l’avait prouvé dans sa première