Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 3.djvu/83

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elle pas rappelé les paroles qu’il avait prononcées à l’occasion de la plantation de l’arbre de la liberté au Cap : En France tout le monde est libre, et tout le monde travaille ? Lui et son collègue n’avaient-ils pas prescrit aux noirs guerriers l’obligation de forcer au travail ce tas de vagabonds et de fainéans qui ne veulent ni cultiver la terre ni défendre les cultivateurs ? Eh bien ! c’est ce que l’on faisait dans le Sud et dans l’Ouest. Lefranc, nommé inspecteur des cultures dans le Sud, remplissait avec zèle ce service. Cependant, nous verrons accuser cet officier et Rigaud lui-même, de vexations inouïes, de traitemens barbares à l’égard de tous les noirs sans distinction.

Aux Cayes, l’ordonnateur Gavanon, Européen instruit et honorable, à Jacmel, l’ordonnateur Bonnard, homme de couleur non moins recommandable, secondaient les deux officiers supérieurs qui commandaient le Sud et l’Ouest. Par leur administration éclairée et sage, le commerce des États-Unis surtout, celui des îles neutres de l’archipel des Antilles, affluaient dans ces deux ports et échangeaient les produits étrangers contre ceux de la colonie. L’abondance y régnait et se répandait dans les autres communes de l’intérieur ou des côtes du golfe de l’Ouest. Des corsaires armés par les républicains capturaient des navires anglais ; on vit après la prise de Tiburon, deux de ces faibles bâtimens capturer même une corvette de guerre. Des bâtimens négriers subirent le même sort, et Rigaud éprouva la satisfaction de rendre à la liberté, les malheureux arrachés du sein de l’Afrique pour être faits esclaves à la Jamaïque.

De son côté T. Louverture agissait de la même manière dans les lieux où il commandait ; les cultures reprirent vigueur ; et le commerce américain et des îles fréquenta le