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Premier Consul, marié depuis plusieurs années à une Créole aimable et distinguée par les plus belles qualités, propriétaire à la Martinique, et nous croyons aussi à Saint-Domingue[1], n’avait pas déjà réfléchi sur la situation des colonies françaises, avant d’arriver au pouvoir ? Il y parvenait, alors que le travail d’une réaction contre la liberté générale des noirs s’élaborait, tant dans l’opinion publique que dans le gouvernement et la législature : il était difficile qu’il ne se laissât pas influencer par ces précédens qui durent venir en aide à ses propres réflexions. La conduite de Rigaud et des anciens libres à Saint-Domingue, représentée sous un si faux jour ; les attentats commis par T. Louverture contre l’autorité de la métropole en la personne de plusieurs de ses agens, ses liaisons avec les Anglais et les États-Unis : tout devait contribuer à faire adopter par le gouvernement consulaire, une politique expectante par rapport à cette colonie en particulier : de là le retard mis au départ des trois agens.

Pamphile de Lacroix dit qu’à cette époque, — « une expédition destinée pour l’Egypte, sous les ordres du général Sahuguet, et commandée par le contre-amiral Gantheaume, était partie des ports de France ; et que pour masquer sa vraie destination, on fit courir le bruit qu’elle allait à Saint-Domingue[2]. » Il ajoute que « T. Louverture devint soucieux et inquiet, et que les ennemis de la France (les Anglais probablement) profitèrent

  1. Il existait une habitation sucrerie sous le nom de Beauharnais, tout près de Léogane. Nous croyons qu’elle appartenait à la famille du premier mari de l’Impératrice Joséphine.
  2. L’amiral Gantheaume partit de Brest le 5 pluviôse an 8 (25 janvier 1800), et les trois agens ne partirent qu’en mai suivant.