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Non ; disons simplement avec Pamphile de Lacroix, qu’il n’hésita point à accueillir les accusations produites contre Moïse ; trop de motifs concouraient à la perte de ce jeune homme, pour qu’il échappât à son funeste sort : nous les avons déjà énumérés.

Le 6 brumaire (28 octobre), Moïse fut considéré comme prisonnier d’État : le 10 (1er novembre), beau jour de la fête du gouverneur, il donna l’ordre au général Clervaux de le conduire dans le cachot du Grand-Fort du Port-de-Paix. Pourquoi pas au Cap où il aurait conspiré ? Il y avait en cela une pensée que nous verrons se produire bientôt au grand jour.

De D’Héricourt, le gouverneur se rendit au Cap, ensuite au Fort-Liberté, au Trou ; et dans tous ces lieux, d’affreuses exécutions, des boucheries d’hommes signalèrent la présence de T. Louverture.

M. Madiou porte le nombre des victimes, au Trou, à un millier de cultivateurs[1]. En supposant ce chiffre exagéré (et nous le croyons), en le portant seulement à cent, n’est-ce pas déjà trop d’hommes sacrifiés, après le rétablissement de l’ordre ?

Eh quoi ! tous sont soumis au despotisme du sabre, et la baïonnette exerce encore ses meurtriers ravages sur des hommes, jadis esclaves, devenus libres, rétablis de fait dans l’esclavage, qui se soulèvent un instant contre leurs oppresseurs ! T. Louverture n’avait donc point d’entrailles, même pour ses frères qui avaient jadis souffert comme lui ?

Dans notre deuxième livre, nous avions promis que si nous le rencontrions dans la fatale voie d’une réaction

  1. Histoire d’Haïti, t. 2, p. 123.