de la présente proclamation, pour me faire parvenir vos dernières intentions et vous rallier sous mes étendards… En un mot, vous savez ce que je puis, ce que j’ose : songez à votre salut. Recevez ici la promesse sacrée que je fais, de ne rien entreprendre contre votre sûreté personnelle ni contre vos intérêts, si vous saisissez cette occasion de vous montrer dignes d’être admis au nombre des enfans d’Haïti.
Cette proclamation était aussi mal conçue que mal rédigée : elle fut l’œuvre de J. Chanlatte, d’un esprit aussi extravagant que celui de B. Tonnerre. En traitant ces habitans d’Espagnols, c’était leur dire qu’ils étaient tout-à-fait étrangers au peuple qui venait de proclamer l’indépendance de toute l’île d’Haïti pour ne former qu’un seul État. La grande majorité de ces habitans étant de race africaine, il fallait au contraire leur tenir un langage fraternel et non menaçant ; c’était se poser en conquérant, et le ton de cet acte se ressentait de cette disposition ; il contenait des expressions injurieuses autant qu’impolitiques. Leur dicter un délai de quinze jours pour se soumettre, c’était une absurdité, en présence des troupes françaises qui les contenaient et des habitans blancs qui avaient la haute main dans la direction des esprits. Et comment ces derniers pouvaient-ils avoir confiance dans la promesse sacrée de ne rien entreprendre contre leur vie et leurs propriétés, après tant de promesses violées ? En politique, tout porte son fruit, la violence comme la modération. Les antécédens de Dessalines étaient d’ailleurs assez connus, et il venait récemment d’y ajouter.
Les habitans du Cibao seuls s’étaient soumis à son autorité, en envoyant au Cap, en décembre 1803, une députation ; de trois d’entre eux ; mais on a déjà vu qu’il avait commis la faute de leur imposer une contribution