Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 7.djvu/130

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de Jacmel eût pu se lever en armes contre le gouvernement, malgré la présence de Bonnet et de David-Troy au chef-lieu. Quoique plus rassuré à cet égard que qui que ce soit, Pétion dut prendre les mesures militaires que nécessitait cette situation. La générale fut battue dans la nuit même afin de réunir les troupes et les citoyens : le lendemain matin, le président fit défiler la 3e demi-brigade sous les ordres de Gédéon, et les bombardiers sous ceux du chef de bataillon Laverdure, pour se rendre à Jacmel et assister le général Bonnet. Quand ces officiers y arrivèrent, Bonnet était déjà maître du terrain : la conspiration était étouffée dans la ville, et les campagnes étaient restées paisibles. Gédéon n’entra même pas à Jacmel ; il resta sur l’habitation Pasquet, sur l’ordre du général Bonnet.

Alors survint, de la part des autorités, une de ces mesures qu’on ne saurait trop déplorer et blâmer sévèrement. Des citoyens inoffensifs, des commerçans paisibles, furent accusés d’être les complices de Magloire, de lui avoir fourni de l’argent pour parvenir à ses fins ; et, peut-être sans preuves aucunes, dix-sept d’entre eux furent arrêtés, liés ensemble, livrés à un détachement de troupes commandé par Laverdure, pour être conduits, disait-on, au Port-au-Prince où ils seraient jugés. Les fonds qu’ils avaient dans leurs magasins de commerce, leurs marchandises, leurs effets mobiliers, furent saisis comme devant être confisqués au profit de l’Etat ; une partie de cet argent fut donné aux troupes, l’autre passa aux mains on ne sait de qui ; les marchandises et effets furent également partagés de la même manière. Ce fut un pillage organisé, à l’imitation blâmable du pillage désordonné que les soldats et les campagnards avaient fait des che-