Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 7.djvu/216

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

D’autres motifs décidaient, Pétion à retourner au Port-au-Prince ; il voulait surveiller l’armement du trois-mâts qui venait d’être acheté, et il savait en outre que des intrigues s’ourdissaient dans cette ville, depuis que le sénat avait adressé son message de félicitations au général Gérin. Il n’y était question que de son courage, de sa capacité militaire, que le président laissait sommeiller dans la retraite ; on prenait prétexte de la difficulté des communications, pour faire entendre que Gérin seul pouvait les rétablir. Le colonel Boyer, que le président avait envoyé en mission au Port-au-Prince et qui y était le 1er novembre, fut probablement celui qui put bien l’informer de ces intrigues. Il se trouva ensuite à bord du Derénoncourt, pendant le combat du 15 entre les deux flottes ; il en écrivit la relation à Caneaux, commandant de la place du Port-au-Prince, en lui parlant aussi de la situation de l’armée assiégeante, d’après ce qu’il avait appris.

Informé de cela, le 17 le sénat invita Caneaux « de se rendre dans la salle des séances, pour lui donner connaissance des nouvelles qu’il a reçues de l’armée dévant Saint-Marc. » Caneaux exhiba deux lettres de Boyer, écrites le 15 à bord du Derénoncourt. « Après un morne silence, continue le procès-verbal, un honorable membre a pris la parole et a dit que les circonstances actuelles nécessitaient que l’embargo fût tout de suite mis sur tous les bâtimens de la rade, jusqu’à ce qu’on reçoive des nouvelles directes du Président d’Haïti et qu’on sache la situation de l’armée. La motion est adoptée. » Ensuite, l’ordre en est donné à l’autorité militaire, avec injonction de mettre en réquisition une partie de la garde nationale de la plaine et de la