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lonie partagea la répugnance de la métropole à consentir à cet acte de cession[1]. Dans la prévision de ce sentiment, comme à cause de la situation où se trouvait la partie occidentale de l’île, en 1795, l’art. 9 du traité avait stipulé, pour les habitans, la faculté de se retirer avec leurs biens sur d’autres domaines de la couronne d’Espagne ; mais aussi, pour les y retenir autant que possible, le Directoire exécutif voulut bien que les autorités espagnoles continuassent à administrer cette colonie, jusqu’à ce qu’il pût y envoyer des fonctionnaires et des troupes d’Europe. Son motif particulier à cet égard, c’est qu’alors la réaction s’opérait en France contre la liberté générale des noirs, et qu’on voulait ménager le statu quo de l’esclavage existant dans la partie franco-espagnole[2]. Malgré ces précautions qui devaient les rassurer, beaucoup d’habitans l’abandonnèrent à cette époque, pour passer soit à Cuba, à Porto-Rico ou à la Côte-Ferme, afin de ne pas être considérés comme Français.

Quand, en 1801, Toussaint Louverture effectua, de son chef, la prise de possession de ce territoire au nom de la France, ce fut encore pis : une émigration considérable d’habitans eut lieu, parce qu’on y connaissait l’homme personnellement, et qu’on répugnait encore plus à être sous le joug des noirs.

À l’arrivée de l’expédition sous les ordres du général Leclerc, on s’empressa de se soumettre à son autorité, — ce que firent d’ailleurs le général Clervaux, d’abord, puis le général Paul Louverture, — parce qu’à tout prendre, on

  1. Il s’agissait cependant de reprendre les places importantes de Figuières, de Dosas, et d’une grande partie de la Navarre.
  2. D’après le décret de la Convention nationale sur la liberté générale, ce territoire devenant une colonie annexée à Saint-Domingue français, il ne devait plus y avoir des esclaves ; mais l’état antérieur des choses s’y maintint.