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Après la campagne infructueuse de 1809, au Mirebalais et à la Sourde, Pétion ne s’était attaché qu’à augmenter le nombre des bâtimens de la flotte, pour secourir le Môle, en renforts de troupes de temps en temps, et chaque mois, en objets d’approvisionnemens de toute espèce[1]. Les préoccupations politiques que lui avait suggérées la conduite de Gérin, puis sa folle entreprise, ne le détournèrent point de ce soin urgent. Déjà, nous avons cité sa lettre du 25 février, où il faisait espérer à Lamarre que deux frégates et une corvette arriveraient bientôt et donneraient une prépondérance marquée à notre flotte sur celle du Nord. Mais, contre son attente, ces bâtimens ne lui furent pas envoyés pour empêcher la chute du Môle, tandis que Christophe reçut une frégate, qui fit obtenir à sa flotte la supériorité sur la nôtre. En mai, cette dernière était composée de 15 navires, dont 2 corvettes ou trois-mâts, 6 brigs et 7 goëlettes, y compris le Derénoncourt.

À la fin de ce mois, toute la flotte était réunie dans le port du Môle. Il y avait alors 17 batteries ennemies, de canons, d’obusiers et de mortiers, dirigées contre cette place et ses différens postes. Le 3 juin, Lamarre écrivit au président que, la veille, une nouvelle batterie de 2 pièces de 18 avait été établie par l’ennemi, dans une position qui faisait atteindre les bâtimens de la flotte ; et que Panayoty fut contraint de les faire sortir du port pour

  1. En février, Madame Chartron, Française qui s’était faite capitaine d’un corsaire de sa nation, se rendit au Môle et fournit à Lamarre quelques barriques de tafia et d’autres provisions nécessaires à l’armée ; elle vint ensuite au Port-au-Prince où le président lui fit payer la valeur de ces objets. Cette femme, d’une stature colossale, était d’une bravoure extraordinaire ; elle visita les postes du Môle où pleuvaient les boulets et les bombes. « Elle a eu la bonté de m’offrir ces objets, dit Lamarre à Pétion, dans sa lettre du 12 février : je vous prie d’avoir des égards pour elle. »