Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 7.djvu/530

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Tel fut, à peu de chose près, l’entretien qui eut lieu entre le chef de l’État et le général qui venait de faire le sacrifice de tout amour-propre personnel pour se soumettre à son autorité. D’un côté, on reconnaît en Pétion la continuation de ces ménagemens dont il usa envers Borgella, de l’estime profonde qu’il avait pour son caractère loyal, son mérite militaire et sa bravoure ; de l’autre, on voit le modeste patriotisme, toujours prêt à se sacrifier pour le salut général, à se dévouer à l’accomplissement d’une mission périlleuse.

Borgella quitta donc le président et se rendit à franc étrier au poste où il devait joindre le général Marion, pour lui notifier verbalement l’ordre de le remplacer ; il était accompagné de ses aides de camp Solages et Chardavoine, qui allaient partager ses périls[1]. Marion ne fit aucune difficulté de lui remettre le commandement, parce qu’il n’y avait pas à douter de la parole d’un tel officier général, son ancien compagnon d’armes de la Légion de l’Ouest, et qu’il ne pouvait avoir quitté la ligne qu’il défendait, que par ordre du président[2].

Pendant que Marion lui donnait des renseignemens sur les divers corps de troupes qu’il allait avoir sous ses ordres, une balle vint frapper à mort un soldat qui était tout près d’eux ; en même temps, Guerrier faisait sortir du poste de Bussy, ses troupes divisées en trois colonnes pour enlever celui occupé par Néret. Borgella arrivait à point pour notifier, à lui aussi, l’ordre du président consistant en ces mots : « Vous n’irez pas plus loin ! »

Marion partit, mais Bauvoir était là, la 15e y était

    mais il paraît qu’il craignit que l’ennemi n’attaquât en même temps les lignes de la place : la garnison n’était que d’environ 8,000 hommes, et l’ennemi doublait ce nombre, au moins.

  1. Il avait en ce moment avec lui deux de ses guides, Louis Pierre et Saint-Surin.
  2. Francisque prit alors le commandement de cette ligne.