ces premiers temps ; le pouvoir absolu de Christophe suppléait à tout le reste. À cette occasion, aidons-nous des appréciations suivantes extraites de l’Histoire d’Haïti, t. 3, p. 419 :
« Christophe, chef absolu des provinces du Nord et de l’Artibonite, exerçait sur les populations soumises à son autorité un despotisme déjà sanglant. Sa volonté avait remplacé la loi, et quiconque osait se plaindre de ses actes tyranniques était conduit à l’échafaud. Il avait déjà établi dans les campagnes une organisation par laquelle l’homme était attaché à la glèbe, comme sous Toussaint Louverture. Le produit du travail forcé subvenait largement aux dépenses de son gouvernement. Le propriétaire n’était plus le maître de ses revenus ; les agents du fisc s’en emparaient et en remplissaient les magasins du gouvernement. Les propriétés de ceux qu’on envoyait à la mort étaient confisquées au profit de l’État, et leurs héritiers, pour sauver leurs jours, étaient contraints de taire leur ressentiment. Bien que Christophe ordonnât que la morale fût en vigueur, il laissait s’approcher de lui des courtisanes qui intriguaient avec des favoris autour de sa personne. Ses ordonnances étaient admirables, mais il les transgressait lui-même ; il proclamait la loi souveraine, mais elle était toujours suspendue par ses caprices ; il envoyait pour un temps à la Ferrière, un bourgeois ou un militaire, mais celui-ci y demeurait toute sa vie ; les habitans du Nord étaient libres d’aller où ils voulaient et de dire ce qu’ils pensaient, sous la réserve d’être arrêtés, s’il plaisait au chef de l’État d’Haïti, d’être fusillés ou décapités, ou d’être condamnés aux travaux forcés dans les fortifications. Néanmoins en faisant abstraction de ses