aucun crime, aucun excès contre qui que ce soit, même à l’égard des officiers de tous grades qui se refusèrent, malgré ses instances, à prendre la direction de ce mouvement militaire et politique. À cette modération digne de servir d’exemple, il joignit un désintéressement rare, peut-être unique, en ne s’attribuant aucun grade parmi ses compagnons d’armes : le titre de grenadier de la 9e lui suffit ! C’est qu’il était réellement animé du feu sacré de la Liberté, du sentiment républicain qui porte l’âme aux grandes choses, qui ennoblît les actions des hommes qui se dévouent à cette forme de gouvernement, tandis qu’à d’autres, il faut des grades pour anoblir leurs personnes. Honneur à la mémoire de Rebecca ! car il honora son pays.
Se rappelant la lutte que Lubin Golard avait soutenue dans cette péninsule, et sachant qu’aucun des officiers de la 9e n’avait pris part à l’insurrection, Christophe voulut employer une feinte modération pour pacifier ces quartiers, alors que les montagnes du Gros-Morne étaient dans le même état. À cet effet, il fit répandre le bruit, par des soldats qu’il envoya de tous côtés, que Rebecca étant mort, il n’en voulait plus à qui que ce soit ; qu’il étendait une amnistie sur tous sans distinction. Des vieillards des deux sexes qui ne pouvaient continuer à gravir les montagnes furent les seuls qui vinrent faire leur soumission ; tous les soldats de la 9e, tous les hommes valides se retirèrent au fond des bois plutôt que de se rendre à sa voix, persuadés que sa parole serait violée. Le capitaine Alain était parmi eux et partageait leur conviction à cet égard : apprenant eux-mêmes que Nicolas Louis, Bauvoir, Catabois et les autres officiers n’avaient pas suivi Pourcely, ils le chargèrent d’aller prier ces chefs de prendre la direction de leur défense contre le tyran. Nicolas Louis con-