Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 9.djvu/198

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Chambre des représentans des communes ; et il a été décidé que leurs suppléans sont appelés à les remplacer dans leurs fonctions, que communication sera donnée au pouvoir exécutif de cette détermination, et qu’elle (la Chambre) doit s’occuper de l’adresse qui sera faite au peuple. »

Ainsi, il est constaté par ce procès-verbal, qu’il n’y eut pas « complète unanimité » parmi les représentans pour l’exclusion de leurs collègues ci-dessus dénommés, et il est probable que la plupart de ceux qui opinèrent en faveur de cette mesure inconstitutionnelle étaient sous l’influence de l’intimidation exercée par le Président d’Haïti ; car, à moins d’être aveuglés par la passion, les membres d’un tel corps ne prennent pas de semblables résolutions qui les privent eux-mêmes des garanties établies par une constitution[1].

Malheureusement pour le pays et pour Boyer lui-même, la facilité avec laquelle la Chambre des communes prononça l’exclusion de ceux de ses membres qui voulaient faire opposition à son pouvoir, devint la règle qu’on suivit par la suite et dont on abusa étrangement.

Par son caractère, Boyer ne pouvait employer ce que nous avons appelé les séductions du pouvoir, beaucoup plus agréables, pour se créer dans la Chambre une majorité compacte qui pût paralyser les opposans : il préféra l’intimidation. Mais ce moyen, s’il plaît davantage à la vanité d’un chef d’État, a certainement plus de danger pour lui-même,

  1. Il faut convenir, néanmoins, que les circonstances prêtaient singulièrement à l’emploi de l’intmidation, pour arrêter toute velléité d’opposition dans la Chambre des communes. La trame ourdie par le général Romain, sa mort violente, l’exécution de son complice, instrument de ses desseins, avaient forcé le gouvernement de prendre une position menaçante par rapport aux propos qu’on tenait à la capitale ; et c’est dans ce moment même que la Chambre commit l’imprudence de donner lecture publiquement de la pétition incendiaire de F. Darfour, sans remplir ensuite son devoir de corps politique !