Mais, quelques jours après, le 6, il reproduisit sa pensée dans une proclamation « au peuple et à l’armée, » qui devenait une sorte de manifeste envers les puissances étrangères, et parce que cet acte avait une plus grande importance que son discours, et qu’il était destiné à prescrire des mesures de défense générale, pour l’éventualité d’une agression. Après avoir rappelé que l’existence politique d’Haïti datait de vingt années déjà, que l’objet constant du gouvernement de Pétion fut de diriger les esprits vers l’ordre et la civilisation, il dit :
« Animé de son esprit, dès que je fus appelé à lui succéder, je m’efforçai de marcher sur ses traces. Ma sollicitude, entre autres objets d’intérêt public, s’occupait constamment des moyens de conclure des rapports directs et officiels avec les gouvernemens des peuples qui font un commerce avec Haïti : les avantages qu’ils en retirent soni universellement connus. Il était naturel de penser, dans l’état des choses, que des intentions si louables obtiendraient un résultat favorable. La justice, la philanthropie, l’intérêt d’une sage politique, qui doit tendre à consolider la prospérité du commerce, tout s’accordait pour légitimer la conclusion de ce grand objet. Qui pouvait d’ailleurs raisonnablement s’y opposer ? Depuis longtemps nous sommes complètement émancipés. Tranquilles dans notre pays, fidèles à nos devoirs constitutionnels, nous restons absolument étrangers au système colonial ; et, neutres dans les mouvemens qui peuvent ou pourront exister dans les iles
France étant en négociation avec Haïti, il n’y avait pas lien pour elle de trancher la question par la reconnaissance de notre indépendance. Mais, à notre point de vue national, nons pouvons dire aussi qu’un tel acte de sa part eût porté la France à être plus raisonnable envers nous. Au reste, on a dit, on a pensé, que la Grande-Bretagne avait notifié à la France, que si elle ne se décidait pas à reconnaître l’indépendance d’Haïti, elle s’y déciderait elle-même : de là serait survenue l’ordonnance de 1825.