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Page:Ardouin - Étude sur l’histoire d’Haïti, tome 9.djvu/281

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formel et légal, l’approbation et la confirmation de l’état de choses (de l’indépendance nationale) dans lequel des événemens extraordinaires les ont placés, et dont ils sont en possession depuis un laps de temps qui semble leur avoir acquis une prescription suffisante contre toute réclamation. » On ne reconnaît pas son esprit, ordinairement si judicieux, dans de telles paroles écrites et signées de sa main.

Que devenaient donc, à ses yeux, les droits imprescriptibles que ses concitoyens avaient reçus de la nature ? Le 1er janvier 1804, l’indépendance d’Haïti était aussi légitime, aussi sacrée qu’elle l’était en 1824, qu’elle le sera dans la suite des siècles. Elle n’avait pas besoin de réclamer en sa faveur « une prescription de temps » contre toutes prétentions de la part de la France et de ses gouvernemens, quels qu’ils fussent : exprimer un doute à ce sujet, par l’emploi du verbe sembler, c’était sacrifier la gloire des héros fondateurs de la patrie haïtienne.

Certainement, et nous l’avons déjà admis, le gouvernement français avait le droit, la mission de tout tenter pour recouvrer l’ancien Saint-Domingue, par suite de son devoir envers la France et surtout pour rétablir ses anciens colons dans la possession de leurs biens immobiliers, de même qu’il en avait été pour le gouvernement britannique par rapport aux États-Unis. Cette situation lui créait des prétentions sur Haïti ; mais ce n’était que des prétentions qui devaient tomber devant la puissance des droits de la nature, reconnus et proclamés antérieurement par la France elle-même, lesquels avaient donné aux Haïtiens le droit bien autrement supérieur de résister à l’oppression tentée par son gouvernement de 1802, de faire la conquête de leur pays, d’en expulser les anciens colons, de confisquer leurs pro-