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anglais, il l’était encore. Quelle preuve plus grande peut-on administrer de la complicité de cet agent, par sa soumission aux instructions qu’il avait reçues du Directoire exécutif, pour attiser entre Rigaud et T. Louverture, les dissensions qui firent éclater la guerre civile[1] ?

Mais, en faisant acte de résistance à T. Louverture, et d’autorité par rapport aux agens britanniques, il blessa profondément le général en chef par les expressions de sa lettre. Il crut le menacer d’aller le dénoncer en France, en lui demandant la corvette pour s’y rendre : il avait affaire à un homme plus habile qu’il ne le pensait, et surtout audacieux.

La lettre de Roume parvint à T. Louverture au moment où Jacmel tombait en son pouvoir. Peu inquiet alors sur les résultats probables de la guerre du Sud, il tourna ses regards vers le Cap où était l’agent. Il se rendit aux Gonaïves. Il avait déjà envoyé l’ordre au général Moïse qui était au Cap, et aux autres commandans militaires, de faire un mouvement insurrectionnel dans les campagnes pour se porter sur le Cap. Un attroupement de 7 à 8 mille noirs se rendit à une demi-lieue de cette ville ; ils vociférèrent contre Roume et tous les blancs qui laissaient, disaient-ils, vendre leurs frères dans la partie espagnole. Enfin, ils demandèrent que Roume et l’administration municipale tout entière comparussent devant eux, pour recevoir leurs plaintes, sinon ils envahiraient la ville qu’ils pilleraient et incendieraient.

  1. Ce même rapport de Chanlatte représente Roume comme agissant de bonne foi, éprouvant la plus vive douleur d’avoir été contraint de proclamer Rigaud rebelle. Dans un autre passage, il dit que cet agent montra dans bien des circonstances une énergie étonnante pour s’opposer aux vues de T. Louverture. A. Chanlatte prouve seulement qu’il était dupe et de Roume et du gouvernement français, si toutefois sa dépendance de ce gouvernement ne le contrgnait pas à tenir ce langague.