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pelé Cangé dans l’Ârtibonite. Ce dernier avait excité les plaintes des citoyens, et l’autre avait encouru la haine de Christophe pour avoir été un des chauds partisans de Sans-Souci. Yayou, qui lui rendait bien haine pour haine, à cause de l’assassinat de son premier chef, ne sut aucun gré à l’empereur de l’avoir sacrifié, ainsi qu’il jugeait, aux exigences de Christophe. Ce sentiment d’aigreur, malgré sa soumission à la volonté impériale, resta dans son cœur et produisit son fruit en 1806.

Partout sur le passage de l’empereur, les troupes s’agenouillèrent, d’après l’exemple tracé à Marchand le 1er janvier : ce fut un usage, un ordre consacré pour l’avenir. Le brave David-Troy dut en faire autant : mandé au palais du Port-au-Prince, il se jeta aux pieds du chef irrité qui lui reprochait son zèle pour les Français, en ordonnant de le fusiller. Le général Pétion, présent à cette scène humiliante et orageuse, pria l’empereur de lui pardonner et obtint sa grâce[1]. Mais David-Troy fut cassé de son grade de chef d’escadron et placé simple soldat dans la 4me demi-brigade. Dartiguenave fut au contraire maintenu à celui de colonel et employé aux Cayes, comme adjoint à l’adjudance-générale du Sud auprès de Papalier. Bigot, maintenu aussi chef de bataillon, devint aide de camp de l’empereur et dut habiter Marchand. Ces différentes décisions prouvent que Dessalines, s’il fut irrité contre David-Troy, était néanmoins bien disposé dans ces premiers momens en faveur des hommes de l’ancien parti de Rigaud.

L’installation du général Yayou, à Léogane, eut lieu

  1. Nous avons entendu dire que ce fut Pétion qui conseilla à David-Troy de se jeter aux pieds de l’empereur, comme l’unique moyen d’échapper à la mort. Ses prières firent le reste.