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drapeaux, — comme citoyens, regagner leurs foyers, rejoindre leurs familles, était pour eux une nécessité. Eloignés de leur lieu natal, ils savaient que H. Christophe devenant chef du gouvernement, ils ne feraient que changer de maître. Avaient-ils tort ou raison de penser ainsi ? Les phrases qui suivent répondent à cette question :

« Il faudra toute la cruelle énergie de Christophe pour la contenir (l’Artibonite) et l’isoler de l’esprit révolutionnaire[1]. » — « Vous ordonnerez de suite la convocation d’un conseil spécial militaire pour juger ce délit, et vous ferez fusiller ce grenadier à la tête du 1er bataillon, après le jugement qui aura été rendu.[2] » — « Au milieu de tant de difficultés, de tant de tentatives de révolte (de la part des troupes), Christophe faisait sentir son autorité, et maintenait, à force de rigueurs, les populations qui rongeaient leur frein.[3] »

Dans le Sud, Gérin eut aussi à lutter contre les populations et les troupes. La Résistance à l’Oppression avait dit : « Oui, nous avons rompu nos fers. Soldats, vous serez payés, habillés ; cultivateurs, vous serez protégés ; propriétaires, vous serez maintenus dans la possession de vos biens. Une constitution sage va bientôt fixer les droits et les devoirs de tous. » Les troupes voulaient donc être payées régulièrement, sans s’inquiéter de savoir si le trésor public avait des fonds. À l’Anse-à-Veau, la 15e demi brigade se mutina à ce sujet, ses officiers en tête. Gérin fit arrêter les principaux de ces derniers, parmi lesquels se

    Horace, Morisseaux, J. Tréméré, Pernier, Sannon et Petit Blain, M. Cébron, M. Constant, Bellevue Dusseaux, Lapointe Aubas, G. Lorquet, etc.

  1. Hist. d’Haïti, t. 3, p. 332.
  2. Ibid. p. 353. Autant eût valu dire à Romain de fusiller ce grenadier avant le jugement.
  3. Ibid., p. 360.