Page:Argens - Mémoires du marquis d’Argens.djvu/113

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par une observation que la princesse fait sur son aumônier.

« Savez-vous bien monsieur le Marquis, que mon aumônier entend le grec, et qu’il dit que votre Descartes n’est qu’un benêt ? Il dépendra de vous, lui dis-je, Madame (c’est le Marquis qui parle) que je vous montre, non-seulement que votre chapelain ne sait rien, mais même qu’Aristote son grand ami, ne savait pas grand’chose. En vérité, me dit-elle, vous me feriez un grand plaisir d’entreprendre une chose aussi extraordinaire, et si vous me persuadez qu’Aristote ne savait rien, je ne doute pas que vous ne veniez à bout de me faire croire que tous les hommes sont des ignorans. Je serai peu en peine, continue le Marquis, de vous prouver qu’ils n’ont de certitude que de très-peu de choses dans la plus grande partie des sciences auxquelles ils s’appliquent. Ah ! je vous prends au mot, dit cette dame, et je suis bien aise de vous voir rompre une lance contre tout le genre humain. Vous vous trompez répliquai-je, je n’aurai rien à démêler avec les véritables savans, et les personnes dont le génie est doué de justesse et de bon sens seront au contraire de