nous marier. J’irai devant le Grand-Turc, dit Clairac ; mais au moins souvenez-vous que ce n’est que pour huit jours. La cérémonie du prêtre grec me paraissant un peu forte, je m’y opposai, et dis que dans l’ile, dès qu’on nous verrait en ménage ensemble, on penserait que nous étions mariés, et qu’en tout cas il n’y avait qu’à dire que nous nous étions fait épouser par l’aumônier du vaisseau ; elles y consentirent, et nous allâmes nous loger chez Isabella, Clairac, Julia, moi et le domestique que nous avions amené.
Nous couchions tous quatre dans la même chambre. D’abord notre ménage fut assez tranquille ; mais le diable s’en mêla bientôt. Julia mon épouse était jolie ; cependant Isabella avait des yeux auxquels je ne pouvais résister. Si Clairac eût pensé sur ma femme comme je pensais sur la sienne, il eût été aisé de lui proposer un troc ; il n’était point dans les mêmes sentimens, et c’est ce qui rendait la chose fort difficile.
Je m’avisai la seconde nuit, lorsque je crus tout le monde endormi, de sortir de mon lit, et de me glisser dans celui de Clairac ; il m’entendit marcher, et fit semblant de dormir. Je passai du côté où était Isabella, et j’avais com-