pouvait fort bien y vivre heureux sans elles. Je lui fis si bien accroire ce que je lui disais, qu’il me donna dans la suite des marques étonnantes de sa crédulité.
J’étais tous les jours avec des gens qui ne respiroient que la tendresse ; il était difficile que je restasse long-temps indifférent. J’aimais la Catalane sans le savoir, et je fus étonné lorsque je m’aperçus combien j’avais fait de chemin sans y prendre garde. Elle avait autant de goût pour moi que j’en avais pour elle.
Nous eûmes peu de peine à nous persuader que nous nous aimions. La première marque essentielle que nous nous en donnâmes fut dans sa loge. Si le mari eût pu m’y voir, sans doute il se seroit désabusé de l’opinion qu’il avait de moi.
Depuis ce jour, je ne vis plus mes livres qu’avec horreur. Je m’étonnais comment j’avais pu me plaire dans un métier que je croyais ne convenir qu’à un pédant. La robe me parut un état affreux. Ce qui me le rendait encore plus odieux, était la contrainte où il m’obligeait de vivre. Ma famille me représentait sans cesse qu’un homme destiné à la charge de procureur-général devait avoir des