Page:Argens - Mémoires du marquis d’Argens.djvu/248

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

et je la trouvai avec Vintimille dans une situation qui n’avait pas besoin de témoins : ils étoient couchés tous les deux. Cette vision me causa un étonnement sans égal. Je ne pus m’empêcher de dire au comte de Vintimille quelques paroles assez piquantes, il ne s’est jamais trop piqué de bravoure : le tout se passa en douceur. Je remontai à cheval, et m’en allai, pour dissiper mon chagrin, dans les terres d’une de mes sœurs, mariée au baron de la Garde, avec qui j’ai toujours parfaitement bien vécu, et à qui j’ai même plusieurs obligations.

Peu de jours après, j’y reçus une lettre de mon père, dans laquelle il m’écrivait de l’aller joindre, pour faire avec lui le voyage de Paris : nous y arrivâmes au commencement de l’hiver. Ma dernière aventure m’avait dégoûté des femmes. Je m’occupai, le temps que je passai à Paris, à la musique et à la peinture. J’allais dessiner tous les jours à l’académie, et je fis connaissance avec M.  Case un des grands peintres qu’il y ait actuellement en Europe[1]. Les affaires de mon père étant

  1. Case ou Cases, peintre célèbre, né à Paris en 1676 et mort dans la même ville en 1754 ; il remporta le grand prix de peinture en 1699 et fut reçu membre