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Page:Argens - Mémoires du marquis d’Argens.djvu/259

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elle, qu’elle donne dans de pareils discours ; ils ne serviraient qu’à lui faire naître des soupçons et peut-être à m’empêcher de vous voir.

Sa mère revint avant que nous eussions rien pu résoudre ; elle lui parla encore de Méry, et la fatigua de la même chanson pendant près de quinze jours ; elle la força même à recevoir les visites de ce galant sexagénaire ; j’étais le témoin de la plupart ; et quoique je fusse fâché de là peine qu’elles faisaient à ma maîtresse, je ne pouvais m’empêcher de rire en moi-même du rôle qu’il jouait.

À la fin, la jeune Besaudin, ennuyée des importunités de sa mère, risqua de se servir de l’expédient que je lui avais donné. La mère avait infiniment de la vanité ; elle fut flattée de ce que lui disait sa fille. Ma maîtresse se vit par-là hors d’affaire, et moi je me trouvai dans un terrible embarras.

Madame Besaudin, à la première visite ; me serra si fort le bouton en présence de sa fille, qu’il me fallut parler clair. J’avouai tout ce qu’elle lui avait dit ; mais j’ajoutai qu’il fallait qu’elle s’en allât à Livourne joindre son mari avec sa fille ; que je là suivrais quinze jours ou trois semaines après, sous le prétexte d’aller à Rome, et qu’il nous