Page:Argens - Mémoires du marquis d’Argens.djvu/325

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me demandait assez souvent : on en vint jusqu’au point que je vis qu’il fallait songer à finir. Clairac reçut dans ce temps-là ordre de partir de Douai pour aller à Valenciennes ; je partis aussi pour aller à Maubeuge joindre le régiment, qui devait passer en Allemagne, pour aller au siège de Kehl.

Peu d’officiers étaient préparés à faire la campagne. Vingt-deux compagnies des grenadiers avaient passé Kehl, qu’il y avait des paris à Strasbourg qu’on n’aurait pas la guerre. Enfin l’ordre pour la marche de l’armée arriva. Nous passâmes ce fleuve sur deux ponts, et l’armée campa le soir avec tant de confusion que, si les ennemis avaient eu le moindre camp volant, ils nous eussent enlevé un ou deux quartiers qu’on n’aurait pu secourir. Nos officiers-généraux avaient perdu l’usage de la guerre, et Kehl fut rendu avant qu’on eût pu régler au juste le campement. Le régiment ayant monté la tranchée, j’étais détaché de piquet ce jour-là, et je m’amusais à voir tirer des bombes d’une de nos batteries. Un éclat qui revint pensa me couper le pouce : heureusement j’en fus quitte pour une meurtrissure assez considérable.

La campagne finie, je partis pour aller chez